Information détaillée concernant le cours

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Titre

Linguistique et questions de genre : perspectives et enjeux

Dates

18 janvier 2024

Lang FR Activité en français
Responsable de l'activité

Corinne Rossari

Organisateur(s)/trice(s)

Mme Aylin Pamuksaç, Université de Neuchâtel

Mme Loanne Janin, Université de Neuchâtel

Mme Justine Salvadori, Université de Fribourg

Intervenant-e-s

Prof. Sandrine Zufferey, Universität Bern

Prof. assistante Julie Abbou, Università di Torino

Prof. émérite Éliane Viennot, Université Jean-Monnet-Saint-Étienne

Description
Descriptif

Cet événement souhaite rassembler plusieurs chercheuses francophones autour de la thématique "Linguistique et questions de genre". Les intervenantes proposeront à cette occasion des études représentant des pans variés de la linguistique tels que la psycholinguistique, la linguistique historique ou encore l'analyse textuelle, en mettant l'accent sur les perspectives féministes. Des discussions et des échanges sont également prévus afin de permettre aux participant·es de poser des questions et de partager leurs réflexions sur le sujet. 

L'événement vise globalement à encourager la prise de conscience des biais de genre dans la langue et à réfléchir à des solutions pour une langue plus inclusive et égalitaire.

 

Présentations de doctorant·es

Les personnes intéressées par une présentation dans l'après-midi (20 minutes de parole et 10 minutes de questions) sont priées d'envoyer un titre et un court paragraphe descriptif à Aylin Pamuksaç ([email protected]), Loanne Janin ([email protected]) et Justine Salvadori ([email protected]) d'ici le 4 janvier 2024 au plus tard.

N. B. : Les exposés peuvent aborder un thème différent de celui de l'activité.

Programme

8h30-8h45 : Accueil

8h45-9h : Présentation de l'école doctorale

9h-10h30 : Prof. Sandrine Zufferey (Universität Bern) - Combattre les inégalités de genre dans la langue : l'apport de la psycholinguistique

10h30-11h : Pause-café

11h-12h30 : Prof. assistante Julie Abbou (Università di Torino) - Le genre n'est pas un objet de recherche. Des études linguistiques sur le genre aux études Genre & Langage

12h30-14h : Repas en commun

14h-15h30 : Présentations des doctorant·es

15h30-16h : Pause-café

16h-17h30 : Prof. émérite Éliane Viennot (Université de Saint-Etienne) - Féminiser la langue ou la respecter ? La masculinisation du français depuis la fin du Moyen Âge

17h30-18h : Table ronde et clôture de la journée

Lieu

Université de Neuchâtel

Information
Prof. Sandrine Zufferey (Universität Bern)
Combattre les inégalités de genre dans la langue : l'apport de la psycholinguistique

Dans la majorité des langues du monde, le féminin représente le cas marqué, à la fois du point de vue formel (formes féminines dérivées à partir du masculin) et fonctionnel (le masculin est considéré comme la forme par défaut dans la communication). Cette asymétrie a conduit à considérer, notamment en français, que le masculin représente une forme neutre, capable de représenter l'ensemble des locutrices et locuteurs. Dans cette présentation, nous discuterons les résultats d'études de psycholinguistique qui montrent de manière empirique que cette idée est erronée, et que le masculin dit générique contribue en fait à invisibiliser les femmes, avec des conséquences sociales importantes notamment pour les enfants et les jeunes. Pourtant, les nouvelles formes de langage plus égalitaires qui ont vu le jour au cours des dernières décennies sont fortement combattues par une partie de la population. L'utilisation de nouvelles formes comme le point médian notamment crispe les débats autour de l'écriture inclusive, car elles sont accusées de réduire la lisibilité des textes. Nous montrerons que ces craintes n'ont pas lieu d'être et que les formes plus égalitaires de langage comme la neutralisation, les doublets et le point médian représentent au contraire des mesures efficaces pour améliorer la représentation des femmes dans la langue. 

 

Prof. assistante Julie Abbou (Università di Torino)
Le genre n'est pas un objet de recherche. Des études linguistiques sur le genre aux études Genre & Langage

Plaidoyer en faveur d'une interdisciplinarité forte, cette communication s'emploiera à montrer la nécessité de s'inscrire dans les études de genre pour penser le genre en sciences du langage. En effet, l'intensification des discours et des pratiques autour du genre dans la dernière décennie, a – dans son sillage – naturellement entrainé une démultiplication des travaux sur ce thème, y compris en linguistique. Si on peut saluer la dynamique d'une discipline en prise avec le monde social dans lequel elle évolue, elle se fait parfois au prix d'une réduction majeure de la notion de genre à un simple objet. Je voudrais proposer quelques pistes qui permettent de déployer ces travaux sans sacrifier l'apport conceptuel du genre. 

Après avoir présenté rapidement l'articulation entre genre, féminisme, queer et sexualités, je défendrai la nécessité de l'interdisciplinarité entre sciences du langage et études de genre, en montrant les apports majeurs que les études de genre peuvent offrir aux sciences du langage, ainsi que les apports de l'analyse linguistique pour penser le genre. Je balaierai ensuite les différentes approches – au sein des sciences du discours – qui existent pour penser le genre, qu'il s'agisse de la rhétorique (notamment de la nouvelle rhétorique), de l'analyse du discours, de la sociolinguistique, des approches ethnographiques du langage, de l'interactionnisme, ou encore de la sémiotique. Dans un troisième temps, je mentionnerai un certain nombre d'écueils à éviter, en premier lieu celui de l'écriture inclusive. En effet, il est nécessaire de se défaire de la question de l'écriture inclusive, pour pouvoir mettre à distance le paradigme de l'inclusion, dont les apports intellectuels et politiques sont très discutables. Il est également nécessaire de ne pas se laisser enfermer dans une logique seulement documentaire. En effet, le fourmillement formel actuel génère parfois une tentation du catalogage. Si un état des lieux à grande échelle des pratiques contemporaines serait un apport descriptif majeur, la multiplication de micro-corpus nous empêche souvent de travailler sur des questions théoriques de plus grande ampleur, autour du discours comme lieu social de la catégorisation, et donc lieu politique de l'interpellation. Enfin, il est nécessaire de toujours recontextualiser les catégories et qualifications, qui se donnent comme allant d'elle-même, y compris la notion d'écriture inclusive, dont l'histoire récente montre une fabrique tout sauf évidente

Une fois ces écueils écartés, on peut alors apercevoir le réel apport d'une approche discursive du genre, et la contribution épistémologiques, théorique et méthodologique des études de genre à l'analyse du discours. Concrètement, cela permet de formuler de nouvelles questions, qui constituent, pour une part, le paysage contemporain des études en genre et langage : quels sont les processus de catégorisation à l'oeuvre actuellement, notamment dans le discours politique ? Comment certaines notions issues des études de genre, tel que le fémonationalisme par exemple, peuvent permettre de repenser les travaux sur le populisme et les discours populistes ? ou bien sur les femmes antiféministes ? Comment analyser la pratique politique qui produit des néo-qualifications linguistico-médiatiques, le plus souvent en lien avec les questions de race et de genre, tels que la « woke », « politiquement correct », « orwellien » etc. Quelles sont les pratiques contemporaines de prescriptions linguistiques à propos du genre ? Pus largement, quels sont les métadiscours et pratiques de qualification du langage à propos du genre ? Comment s'articulent ces discours sur le genre avec les usages linguistiques réels ? Comment se négocient les catégories de la sexualité entre déclaration et performativité, par exemple dans le cas du viol ? Enfin, des travaux proposent de renouveler les généalogies intellectuelles en réhabilitant la place des études trans dans la pensée du langage. Toute cette production contemporaine nous fournira alors, je l'espère, des pistes de discussion pour envisager de nouvelles questions.

 

Prof. émérite Éliane Viennot (Université de Saint-Etienne)
Féminiser la langue ou la respecter ? La masculinisation du français depuis la fin du Moyen Âge. 

Objet de réflexion, de travail scientifique et de polémique depuis une quarantaine d'années, la « féminisation » de la langue française a récemment connu un changement d'approche. Il apparait désormais que la fameuse question des « noms de métiers, fonctions, titres et dignités » n'était que la partie émergée de l'iceberg, mais aussi que la domination du masculin sur le féminin dans les discours et la syntaxe est pour l'essentiel un phénomène construit. La communication s'attachera à montrer les domaines où la langue a été masculinisée, les arguments de ceux qui ont agi en ce sens, les protestations qu'ils ont soulevées, et les différentes ressources qu'il convient de (re)mobiliser pour nous défaire de ces infléchissements afin de nous exprimer sans sexisme, dans le double respect de la langue et des valeurs dont nos sociétés se réclament aujourd'hui.

Places

15

Délai d'inscription 11.01.2024
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